Humilier plutot que considérer ?

Jean-Paul Valabrega (1) soutient que l’un des mobiles premiers d’un médecin dans l’exercice de sa mission est la recherche de la considération. C’est un mot un peu vieilli qui signifie, selon le Larousse : la bonne opinion qu’on a de quelqu’un ; l’estime, les égards accordés à quelqu’un. Pas forcément des remerciements, encore moins des applaudissements, mais un peu d’estime, un soupçon d’égards. Prenez quelque peu soin de ma personne par votre attitude attentionnée, de moi qui désire m’attacher à prendre soin de vous. 

Tous les soignants ont cette même modeste aspiration. De l’infirmier à l’aide-soignant, sans oublier le médecin, tous sont heureux de donner le meilleur d’eux-mêmes aux patients. C’est, du moins, l’élan initial de leur engagement. En regard, ils ne demandent qu’un peu de considération. J’ai écrit, ailleurs (2), que le moteur de l’activité soignante se trouve effectivement dans le désir de partager la même humanité que celle qu’ils veulent reconnaitre à leurs patients. 

L’éviction sans considération, dont un certain nombre, qui n’ont vraiment pas démérité, est l’objet, est vécue comme une profonde blessure. La réintégration de ces hommes et ces femmes outragés, jetés comme des animaux malpropres, ne suffira pas à laver la peine profonde infligée sans la moindre marque d’intérêt. Il y faudra une véritable demande de pardon, appuyée sur la reconnaissance de leur faute par ceux qui ont cru avoir le droit d’agir de la sorte.
Le pire est que l’outrage rejaillit sur tout le corps des soignants. Que peut, par exemple, penser un jeune qui désirerait s’engager dans cette carrière, lorsqu’il sait que certains de ses éventuels collègues se font traiter de la sorte ? Il y a fort à parier que, d’une part, les candidats se feront plus rares et que, d’autre part, l’humanité de la relation soignante s’éloignera encore plus des lieux de soins ! 

(1) Valabrega Jean-Paul, La relation thérapeutique, Paris, Flammarion, 1962, p. 76.

(2) Larger, Victor, Devenir médecin, phénoménologie de la consultation médicale, Paris, L’Harmattan, 2011.

 

On pourra relire, à ce sujet, un article long de Novembre 2021

2 réflexions sur “Humilier plutot que considérer ?”

    1. Ma thèse publiée à L’Harmattan sous les deux titres Devenir Médecin et Le médecin et le patient, éthique d’une relation, est une manière de visiter les raisons de l’agir médical…

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